Après nous avoir appuyés pendant plus de dix ans, des resserrements budgétaires ont forcé l'INSMT à interrompre le financement du Cerveau à tous les niveaux le 31 mars 2013.

Malgré nos efforts (et malgré la reconnaissance de notre travail par les organismes approchés), nous ne sommes pas parvenus à trouver de nouvelles sources de financement. Nous nous voyons contraints de nous en remettre aux dons de nos lecteurs et lectrices pour continuer de mettre à jour et d'alimenter en contenu le blogue et le site.

Soyez assurés que nous faisons le maximum pour poursuivre notre mission de vulgarisation des neurosciences dans l'esprit premier d'internet, c'est-à-dire dans un souci de partage de l'information, gratuit et sans publicité.

En vous remerciant chaleureusement de votre soutien, qu'il soit moral ou monétaire,

Bruno Dubuc, Patrick Robert, Denis Paquet et Al Daigen






lundi, 27 avril 2015
À la recherche d’une explication moléculaire à votre générosité

Deux ans après l’arrêt de notre financement public, je voudrais dire quelques mots cette semaine sur les dons reçus pour aider à poursuivre l’aventure du Cerveau à tous les niveaux. Comme je le mentionne dans la mise à jour de notre «thermomètre de dons» ci-contre faite la semaine dernière, les 8 000$ amassés la première année ont permis de couvrir la gestion minimale du site et l’écriture des billets dans le blogue français (estimés à environ 7 500$ / an). Et durant l’année qui vient de s’achever, c’est près de 4 000 $ qui ont été recueillis. Je voulais donc surtout remercier ici tous ces gens qui ont pris un peu de leur temps et de leur argent pour permettent la poursuite de ce projet.

Ainsi soutenu par la communauté, il fallait bien que je trouve de quoi d’intelligent à vous mettre sous la dent dans mon billet de cette semaine ! Je n’eus cependant pas à chercher très loin car ce phénomène du don m’était resté dans les neurones. Pensez-y, c’est quand même étrange : des gens qui me sont pour la grande majorité inconnus, m’envoient de l’argent gagné « à la sueur de leur front » pour que je continue à leur résumer des articles scientifiques sur les sciences cognitives… À première vue, ça peut en effet avoir l’air bizarre. Mais d’une part, je ne suis pas le seul à attirer la générosité d’autrui, loin de là : Wikipédia et bien d’autres campagnes de « financement social » sont autant d’occasions de voir la générosité humaine s’exprimer. Et d’autre part, c’est sûr qu’un site qui, par les études qui y sont diffusées, peut nous aider à nous comprendre un peu mieux et, de là, à vivre un peu plus en harmonie avec ses voisins et avec soi-même, peut avoir une « valeur ajoutée » quand à la générosité qu’il suscite. J’ai l’air de me perdre un peu ici, mais j’essaie réellement de comprendre…

Me revient alors à l’esprit un petit peptide dont on a parlé plusieurs fois ici et qui a suscité bien des engouements (même si rien n’est simple…) : l’ocytocine. Tour à tour appelée l’hormone du lien mère enfant, du lien entre les amants et du lien social tout court, l’ocytocine ratisse large et ses effets sur la confiance qu’elle suscite chez l’individu qui la sécrète semblent puissants et immédiats. En retournant lire les pages écrites là-dessus dans le thème « Désir, amour, attachement », j’en ai retrouvé une particulièrement éclairante (le fait est qu’avec près de 600 pages de contenu et plus de 150 sujets traités sur une décennie, je redécouvre parfois moi-même des parties oubliées du site…).

Dans un encadré du niveau moléculaire avancé de ce thème, on peut lire ceci :

« Dans une étude publiée en 2008, Paul Zak propose que l’ocytocine puisse aussi favoriser la générosité en augmentant notre empathie pour autrui. Dans un contexte expérimental où chaque sujet devait se mettre à la fois à la place d’une personne qui donne et qui reçoit de l’argent, les résultats indiquent que le fait d’inhaler de l’ocytocine rend les gens plus généreux dans leurs dons. En fait, comme il s’agissait d’argent réel, on a calculé que ceux qui avaient reçu de l’ocytocine repartaient du laboratoire avec 5% de moins d’argent que ceux qui avaient reçu un placebo.
Mais cette générosité était spécifique à la situation où le donneur était incité à se mettre à la place du receveur. L’effet comportemental de l’ocytocine se manifestait donc encore une fois ici que dans une situation d’empathie, quand un lien réel était établi avec un autre individu. Pour Zak, il ne fait aucun doute que nos interactions quotidiennes avec les autres nous placent constamment en situation où nous sommes amenés à donner un peu de temps ou de ressources à autrui. C’est la base de ce qu’on pourrait appeler le « ciment social » auquel une molécule comme l’ocytocine contribue significativement. »

Cela m’amène à vous parler d’un dilemme que j’ai eu quand j’ai commencé ce blogue il y a quatre ans et demi. Un problème de ton, pourrait-on dire… Car le contenu du Cerveau à tous les niveaux étant écrit de façon neutre ou impersonnelle, la forme du blogue aurait pu poursuivre en ce sens. Mais la jeune tradition du billet de blogue ouvrait sur une implication plus personnelle que nos problèmes de financement ne m’ont bientôt pas laissé le choix de suivre ! Mais je crois que ce changement, ou je me permets parfois une liberté de ton retrouvée, fut bénéfique autant pour moi que pour les gens qui me disent souvent apprécier lire de la science rédigée avec « quelqu’un derrière ». Et c’est, au fond, le propre du véritable journalisme, qu’il soit scientifique ou non, de ne pas faire semblant de se cacher derrière une illusoire objectivité. Les journalistes, comme les scientifiques d’ailleurs, sont des êtres en chair et en os, des cerveaux incarnés avec une histoire de vie, pourrait-on dire aussi pour être plus précis. C’est pourquoi, je crois, qu’il s’écoule rarement 24 heures sans que je ne reçoive un courriel d’un lecteur ou d’une lectrice qui me pose une question, apporte une précision ou veut simplement partager son plaisir d’apprendre à mieux se comprendre et à comprendre sa place dans l’univers…

Et donc peut-être, si l’on se fie à l’expérience de Zak, le fait de sentir un être humain et pas juste un système informatique désincarné derrière le site et le blogue donne aux gens une petite poussée d’ocytocine suffisante parfois pour me la retourner sous différentes formes. Et sachez alors que ce « hug » virtuel, pour employer les termes du Dr. Love (voir le vidéo de Paul Zak ci-bas), produit aussi chez votre humble serviteur un pic d’ocytocine des plus motivants ! Un beau cercle vertueux quoi, le même qui fonctionne à tous les jours avec nos proches et qui soude depuis la nuit des temps la confiance nécessaire entre les membres de l’espèce ô combien dépendante des autres que nous sommes.

* * *

Pour finir, parlant de notre place dans l’univers, je vous signale ce soir la suite du cours sur les trois infinis déjà présentés ici avec celui sur l’infiniment grand donné par l’astrophysicien Robert Lamontagne, de l’observatoire du mont Mégantic (vous trouverez toutes les infos en suivant le lien ci-bas). Un cours donné dans le cadre de l’UPop Montréal, organisme qui fonctionne avec une poignée de bénévoles offrant des cours gratuits à la communauté depuis cinq ans.

On parlait de quoi déjà ? Ah oui, de l’importance don chez les humains… 😉

i_lien Paul Zak: Trust, morality — and oxytocin?
i_lien L’infiniment grand: un univers de nombres astronomiques!

Le développement de nos facultés | Comments Closed


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