lundi, 22 janvier 2024
Le mal nommé « deuxième cerveau » dans nos intestins
Après la grosse annonce de la semaine dernière sur mon bouquin qui dévoilait que je l’ai écrit « grâce aux interactions que j’ai eues avec quelqu’un d’autre », je me suis rendu compte que je n’avais rien dit dans le bouquin au sujet d’une question que les gens me posent souvent après mes conférences : est-ce que c’est vrai qu’on a un « deuxième cerveau » dans le ventre, et si oui, comment est-ce possible ?! J’ai donc ajouté quelques lignes là-dessus dans le livre que je reprends pour vous ici ce matin en les modifiant un peu.
Je dois dire que pour quelqu’un comme moi qui a fait il y a longtemps sa maîtrise sur un invertébré, plus précisément sur un mollusque marin qu’on appelle aplysie, il n’y a rien d’étonnant à avoir des neurones ailleurs que dans le cerveau. Car comme pour mon aplysie, les animaux plus anciens phylogénétiquement ont commencé par avoir des regroupements de neurones, qu’on appelle souvent des ganglions, un peu partout dans leur corps. L’aplysie a par exemple des ganglions buccaux, pédaux, cérébraux (pas plus gros que les autres) et, justement, abdominaux. C’est plus tard dans l’évolution, surtout avec les vertébrés, qu’on va assister à une céphalisation croissante, c’est-à-dire à une concentration des neurones dans la partie rostrale du tube neural, autrement dit dans la tête. Mais les autres neurones, par exemple abdominaux, ne sont pas disparus pour autant !
Il reste en effet dans la paroi de nos intestins des réseaux de neurones (appelés plexus) qui contrôlent le système digestif et dont le véritable nom est le système nerveux entérique. Ces neurones peuvent fonctionner de façon indépendante, pour contrôler par exemple le péristaltisme (contractions musculaires qui font descendre la nourriture dans le tube digestif), mais subissent quand même l’influence du système nerveux végétatif.
Je trouve l’expression « deuxième cerveau » pour le moins surfaite puisqu’on parle ici d’environ 500 millions de neurones en tout, soit près de 175 fois moins que dans le cerveau qui lui en possède 86 milliards ! Cela dit, c’est tout de même cinq fois plus que dans la moelle épinière et à peu près les deux tiers du système nerveux entier du chat.
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