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lundi, 30 janvier 2023
Journal de bord de notre cerveau à tous les niveaux : les trop méconnues cellules gliales. Partie 2, les oligodendrocytes.

Étant toujours dans la phase de relecture finale de mon livre jusqu’à la fin du printemps, je poursuis aujourd’hui le «journal de bord» de ce projet avec la stratégie expliquée il y a deux semaines pour raccourcir un ouvrage actuellement trop long, c’est-à-dire transformer certains encadrés du livre en billets de blogue. Le livre entretenant déjà des rapports étroits avec le site web Le cerveau à tous les niveaux et son blogue grâce à différents renvois, cette conversion ne fait donc qu’étendre une approche déjà présente depuis le début du projet. Je poursuis donc aujourd’hui le « nettoyage » du chapitre 3 avec le deuxième morceau enlevé au sujet des fonctions de deux types de cellules gliales très importantes dans le cerveau. Après les astrocytes la semaine dernière, voici donc un bref aperçu de quelques caractéristiques des oligodendrocytes.

* * *

Les oligodendrocytes sont donc ces cellules gliales dont la membrane cellulaire s’enroule autour des axones pour former la gaine de myéline qui les entoure chez de nombreux neurones. Cette gaine de myéline produite par les oligodendrocytes ne couvre pas entièrement l’axone mais en laisse de petites sections à découvert. Ces petits bouts d’axone exposés s’appellent les nœuds de Ranvier. La gaine de myéline accélère la conduction nerveuse parce que le potentiel d’action saute littéralement d’un nœud de Ranvier à l’autre : il n’a pas le choix, c’est seulement à cet endroit que les échanges ioniques qui produisent le potentiel d’action peuvent avoir lieu. On parle alors de « conduction saltatoire », c’est-à-dire qui saute d’un nœud à l’autre, par opposition à la propagation continue beaucoup plus lente qui survient dans les axones non myélinisés.

On a estimé que la vitesse de l’influx nerveux pouvait être des dizaines de fois, et même jusqu’à 100 fois plus rapide dans les axones myélinisés. Un exemple concret ce serait le corps calleux, ce gros faisceau d’axones qui relie nos deux hémisphères cérébraux, et que les influx nerveux traversent en 150 à 300 millisecondes dans les axones non myélinisés et seulement en 30 millisecondes dans les fibres myélinisées.

Dans les nerfs périphériques et la moelle épinière, c’est un autre type de gliale, les cellules de Schwann, qui produisent la myéline et qui vont myéliniser les axones où la vitesse de l’influx nerveux doit être rapide, comme dans ceux qui forment les nerfs produisant la contraction des muscles qui nous font bouger.

Ce qui est particulier avec la « myélinisation » des axones, c’est qu’elle se termine très tard durant le développement : pas avant le milieu ou la fin de la vingtaine ! En plus, ce sont les axones de la partie frontale du cerveau qui sont parmi les derniers à être myélinisés. Comme c’est une région globalement importante pour la régulation et l’inhibition des impulsions comportementales, plusieurs pensent que c’est relié aux capacités plus limitées de contrôle de soi durant l’adolescence.

Le lien étroit entre l’axone et sa gaine de myéline est aussi évident chez les personnes atteintes de sclérose en plaques où des cellules du système immunitaire attaquent la gaine de myéline, entraînant non seulement des troubles de conduction dans l’axone démyélinisé, mais aussi l’altération et la destruction des axones. Beaucoup d’études ont aussi montré une baisse d’oligodendrocytes dans plusieurs régions cérébrales des patients schizophrènes.

Et c’est sans doute loin d’être la fin des découvertes sur l’importance de la myélinisation qui ne s’achève sans doute jamais complètement à la fin de la vingtaine, finalement. En fait, comme la formation des synapses ou même de nouveaux neurones dans certaines parties du cerveau, elle demeurerait un processus dynamique durant une bonne partie de notre vie. Un processus sensible à ce qui se passe dans notre environnement, et qui semble de plus en plus impliqué dans l’apprentissage et la grande plasticité de notre cerveau. Comme plusieurs expériences le montrent, la myélinisation peut varier en fonction de l’utilisation des voies neuronales. Elle pourrait ainsi en venir à mieux ajuster la vitesse de conduction pour que les influx nerveux provenant de différents axones arrivent de façon plus synchrone sur un même neurone. Avec tous les effets de sommation spatiale et de plasticité synaptique que cela peut déclencher.

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