lundi, 11 mars 2013
Maîtres et esclaves de notre attention
« Nous sommes à la fois maîtres et esclaves de notre attention. Nous pouvons l’orienter et la focaliser, mais elle peut aussi nous échapper, être captée par des événements ou objets extérieurs. » Les deux visages fondamentaux de l’attention sont ainsi décrits par Jean-Philippe Lachaux, directeur d’un laboratoire en neurosciences cognitives à Lyon, France.
Dans un ouvrage publié en 2011 et intitulé « Le cerveau attentif. Contrôle, maîtrise, lâcher-prise. », Lachaux rappelle que nous vivons dans un monde riche et chaotique que notre cerveau ne peut appréhender dans sa globalité. Il n’a donc pas le choix de sélectionner à tout moment certains aspects de son environnement. Mais lesquels ? C’est que l’attention est constamment tiraillée entre ce qui peut l’aider à accomplir une tâche entreprise et les nombreuses sollicitations de l’environnement qui peuvent nous en distraire.
Dans le premier cas, on parle de contrôle du « haut vers le bas » (ou « top down », en anglais) pour rendre l’idée que c’est l’individu qui fixe délibérément son attention sur une tâche. Il s’agit d’un formidable filtre qui peut empêcher les distractions au point de nous rendre « aveugles » à des choses aussi grosses qu’un gorille qui passe sous nos yeux si l’on est fortement concentré sur une tâche difficile.
Dans le second cas, le stimulus en provenance de l’environnement extérieur va pour ainsi dire se frayer un chemin jusqu’à l’attention, la capter du fait de sa connotation dangereuse ou prometteuse pour l’organisme. On parle alors de mécanismes allant du « bas vers le haut » (ou « bottom up » en anglais). C’est le cas de la publicité qui assaille nos sens par son intensité sonore ou visuelle, de son contenu affectif, etc. Ou, de nos jours, des courriels et des statuts de nos ami.e.s des médias sociaux qui viennent à tout moment nous rappeler leur présence, même sur nos téléphones portables, donc partout et à tout moment.
Or notre système d’alarme cérébral et la recherche de nouveautés prometteuses en ressources sont deux mécanismes adaptatifs très puissants de notre cerveau qui sont branchés en permanence sur le « bottom up », autrement dit sur ce qui nous arrive par nos sens. Et ce que Lachaux et d’autres spécialistes de l’attention montrent, c’est que nos « ressources attentionnelles » sont l’objet d’une véritable lutte d’influence entre des régions cérébrales privilégiant des objectifs conscients et planifiés, et d’autres régions sensibles à ce qui pourrait potentiellement nous faire du mal ou du bien dans notre environnement.
C’est donc ce rapport de force qui se joue en nous à chaque instant et qui détermine le déplacement ou le maintien de l’attention. Le comprendre est essentiel pour trouver comment demeurer maître de nous-mêmes quand notre attention a tendance à se focaliser là où on ne le souhaite pas. C’est aussi ce que Jean-Philippe Lachaux abordera lors d’une conférence au Cœur des sciences de l’Université du Québec à Montréal, mercredi soir le 13 mars 2013 (voir le premier lien ci-bas).
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