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lundi, 16 avril 2012
Le piège du « centre » d’une fonction cognitive dans le cerveau

C’est devenu monnaie courante de lire dans les grands médias qu’on a découvert, grâce aux appareils d’imagerie cérébrale, le « centre » de la colère, de la jalousie, de la générosité ou de toute autre émotion ou fonction cognitive particulière. Or il s’agit, au mieux, d’une simplification à outrance. Et au pire, carrément d’une fausseté.

C’est la position défendue en février 2012 par le Dr. William A. Cunningham dans la revue Current Directions in Psychological Science. Son article déconstruit une vision très restrictive d’une région du cerveau que l’on appelle l’amygdale et qui est souvent associée dans la presse populaire au « centre de la peur ».

S’il est certain que l’amygdale devient très active quand une personne a peur de quelque chose, comme l’ont montré nombre d’expériences d’imagerie cérébrale, c’est loin d’être la seule situation où elle « s’enflamme » ainsi, note de Dr. Cunningham. En analysant de nombreuses études portant sur cette structure cérébrale, Cunningham constate que le rôle de l’amygdale est beaucoup plus subtil. Elle semble en effet s’activer en relation avec tout événement qui peut préoccuper quelqu’un à un instant donné. Se retrouver face à face avec un ours est effectivement une situation préoccupante. Mais voir de la bonne nourriture pour une personne qui a faim, ou un individu en détresse pour une personne empathique, aussi. Et des études montrent justement que l’amygdale est aussi très active dans ces situations.

Si l’amygdale peut être active dans des situations si différentes, c’est qu’elle n’agit jamais seule. En effet, le cerveau forme un vaste réseau de structures richement interconnectées et pour la moindre émotion ou tâche cognitive ce n’est jamais une seule région qui s’active, mais plusieurs. Deux, cinq, dix, douze, cela dépend de la fonction en question, de la précision des appareils, et même de la méthodologie employée (voir les 3e et 4e liens ci-bas).

Une structure cérébrale particulière comme l’amygdale peut donc se retrouver à faire partie de différents réseaux fonctionnels dont l’activation distribuée dans l’ensemble du cerveau peut être associée, elle, à une tâche ou une émotion particulière.

Au lieu de vouloir imposer nos catégories langagières à des « centres » cérébraux qui en seraient responsables, mieux vaudrait alors considérer l’ensemble du réseau impliqué. Et peut-être un jour en arriver à déduire une fonction particulière pour une structure donnée, mais une fonction qui ne correspondrait alors pas nécessairement aux mots les plus vendeurs pour les grands médias. Comme la « préoccupation immédiate pour quoi que ce soit » dans le cas de l’amygdale qui, avouons-le, est tout de même moins sexy que la peur pour faire vendre de la copie…

i_lien Why Brain Imaging Studies Can Be Misleading
i_lien THE AMYGDALA AND FEAR ARE NOT THE SAME THING
i_lien New Approach Increases the Usefulness of Brain Scans
a_exp Decoding subject-driven cognitive states with whole-brain connectivity patterns

Que d'émotions! | 4 commentaires »


4 commentaires à “Le piège du « centre » d’une fonction cognitive dans le cerveau”

  1. Kikouk dit :

    Un exemple d’autre utilité de l’amygdale : l’utilité subjective dans la prise de décision (http://psychologie-cognitive.blogspot.fr/2011/06/glimcher-et-al-2004-neuroeconomics.html). Elle est alors reliée à l’ensemble des zones impliquées dans le système de prise de décision, vaste réseau cortical et sous-cortical, qui montre bien que l’important n’est pas une seule zone, mais la manière dont elle interagit avec les autres.

    Le plus étonnant dans le cerveau n’est pas le nombre de neurones, mais le nombre de connexions (160 000 km de fibres axones et dendrites confondus), c’est donc dans les connexions qu’est l’intérêt, pas dans les neurones eux-même.

  2. […] dans le soulier que l’IRMf traîne encore aujourd’hui. Car comment ne pas se méfier de ces « centres » qui s’allument comme par magie si même un saumon mort peut nous faire croire qu’il […]

  3. […] dans le soulier que l’IRMf traîne encore aujourd’hui. Car comment ne pas se méfier de ces « centres » qui s’allument comme par magie si même un saumon mort peut nous faire croire qu’il […]

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