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lundi, 30 novembre 2015
Trois auteurs comme autant de planètes à découvrir

Certains billets de ce blogue résument une étude récente pour la rendre accessible au plus grand nombre. D’autres tentent simplement de présenter des auteurs et leur domaine de recherche en sciences cognitives. Et mon grand plaisir est de trouver un fil narratif qui les relie quand ils y en a plusieurs, comme aujourd’hui.

Le déclencheur de la petite histoire de ce matin commence donc lors d’un récent cours de l’Université de troisième âge où une dame vient me montrer un livre intitulé Incognito. Les vies secrètes du cerveau, de David Eagleman. Je ne connaissais ni l’auteur, ni le livre publié en 2011 en anglais aux États-Unis. En allant voir la page Wikipédia d’Eagleman, je me suis demandé sur quelle planète j’avais vécu les cinq ou six dernières années pour ne pas en avoir entendu parler. De son livre Sum: Forty Tales from the Afterlives, on y écrit par exemple qu’il est :

« an international bestseller published in 28 languages. The Observer wrote that « Sum has the unaccountable, jaw-dropping quality of genius » ».

Eagleman est donc un neurobiologiste qui travaille sur la plasticité cérébrale, la perception du temps (notre « chronomètre mental« ), la synesthésie et les implications juridiques des neurosciences. Il a aussi écrit et présenté une série télévisée de six heures sur le réseau PBS intitulée The Brain with David Eagleman. Les prix et critiques élogieuses défilent ensuite tout au long de la page jusqu’à cette dernière ligne :

« To provide some important critical balance, one review in The Guardian reported that « [t]his book belongs to a popular trend of neuro-hubris – wildly overstating the ramifications of a science that is still in its infancy. The true fascination of neuroscience lies not in bombastic philosophical claims but in the fine detail of brain function, illustrations of the mind-brain problem, and the human interest of case histories. » ».

Je n’ai pas lu Incognito, et je ne peux donc pas juger du bien-fondé de la critique d’Alexander Linklater du Guardian. Mais j’ai apprécié sa perspective historique et son rappel de certaines études de cas bien anciennes comme celle de Phineas Gage au XIXe siècle qui nous révélait déjà bien des choses sur notre fonctionnement mental.

Cette allusion au XIXe siècle allait me fournir la transition subtile (!) vers le deuxième auteur que je voulais aborder aujourd’hui, Michael Anderson et son livre After Phrenology. Je sais, je vous ai parlé récemment de ce livre ici, mais Anderson vient d’accorder une entrevue audio d’une heure à Ginger Campbell dans le cadre de son Science Brain Podcast de novembre. Une heure, donc, avec ce philosophe et neurobiologiste  qui apporte, avec sa conception d’une collaboration entre différentes régions cérébrales où se déroule moult réutilisations neuronales, une voie fort intéressante pour nous sortir enfin de la phrénologie du XIXe siècle à laquelle carbure encore trop souvent les études d’imagerie cérébrale. Bref, un type à propos de qui, s’il n’est pas plus connu dans cinq ou six ans, on devra peut-être se demander sur quelle planète vit la communauté scientifique !

Quant à la dernière personne sur laquelle je voulais attirer votre attention cette semaine, on sait sur quelle planète elle vit depuis trois décennies : la planète des singes !  C’est que Bernard Chapais, primatologue et anthropologue de l’Université de Montréal, vient de publier la version française revue et augmentée de son Primeval Kinship: How Pair-Bonding Gave Birth to Human Society, publié en 2008 et récompensé par la médaille W.W. Howells de l’American Anthropological Association en 2010. Chapais y démontre comment l’étude du comportement des primates permet de comprendre jusqu’à la structure profonde des sociétés humaines, des phénomènes sociaux liés à la parenté jusqu’au système de reproduction humain, en passant par le pouvoir politique et de la compétition économique. Manque plus que l’empathie, dont on a parlé récemment à travers les écrits de cet autre primatologue qu’est Frans de Waal.

Bref, pas une petite affaire. Quelque chose de fondamental qui est encore malheureusement trop passé sous silence, particulièrement du côté francophone, résultat d’une tradition structuraliste et sociologique dominante dans l’Hexagone depuis des décennies. D’où l’importance de cette traduction français que présente Bernard Chapais dans l’entrevue qu’il a donnée il y a deux semaines à l’émission scientifique Les Années Lumières (voir l’avant-dernier lien ci-dessous).

Loin de moi l’idée de faire la promotion de l’achat de cadeaux de Noël (surtout qu’on n’est même pas encore en décembre), mais j’ai tout de même mis en dernier lien ci-dessous la page du site de l’éditeur…

i_lien Incognito – David Eagleman
i_lien David Eagleman (Wikipedia)
i_lien Incognito: The Secret Lives of the Brain by David Eagleman – review by Alexander Linklater
i_lien Neural Reuse and Embodied Cognition (BSP 124)
a_exp The Deep Social Structure of Humankind
i_lien L’auteur des Années lumière : Bernard Chapais
i_lien Liens de sang. Aux origines biologiques de la société humaine

Du simple au complexe | Comments Closed


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