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lundi, 17 avril 2017
Le cerveau, ou l’histoire d’un organe pas comme les autres

Que dire dans une présentation générale sur le cerveau d’environ une heure comme celle que je m’apprête à faire mercredi prochain dans le cadre d’un cours de l’UPop Montréal gratuit et destiné au grand public ? Quel chemin choisir parmi les myriades qui s’offrent à nous ? Procéder par la négative, c’est-à-dire essayer de dire d’abord ce que le cerveau n’est pas, peut être une entrée en matière efficace qui s’attaque de front à certaines mauvaises conceptions fréquentes.

Ainsi, comme je l’écrivais la semaine dernière pour introduire le « premier acte » de cette pièce en trois actes (trois séances données les trois mercredis qui viennent), les métaphores informatiques pour parler du cerveau sont généralement assez mauvaises et ce sont elles que nous allons tenter de « démolir » en premier…

Mais pour les remplacer par quoi ? Par d’autres, comme les attracteurs étranges de la physique du chaos ou le ruisseau de montagne plein de remous qui permettent, elles, d’embrasser à la fois notre longue histoire évolutive, responsable des plans généraux de notre cerveau, et nos réseaux de neurones sélectionnés au fil de notre histoire de vie personnelle. Bref, des métaphores capables de saisir les processus dynamiques, auto-organisationnels et sélectifs qui rendent possible le moindre de nos états mentaux.

Et puis surtout, essayer de montrer comment tout cela s’est mis en place, depuis les débuts de la vie. Car vouloir comprendre le cerveau humain actuel tel quel, avec sa forme étrange et ses réseaux densément interconnectés, c’est un peu comme vouloir comprendre d’un coup comment piloter un 747 en entrant pour la première fois dans son cockpit. Chaque élément du tableau de bord est tellement complexe en lui-même et par ses interactions avec le reste de l’avion que ce n’est tout simplement pas possible. On aurait plus de chances avec un petit Cessna, ou mieux, avec le premier avion des frères Wright !

Eh bien c’est un peu ce qu’on va essayer de faire mercredi : montrer à quel point la cognition semble liée aux plus simples manifestations de la vie. Et à partir de là, voir comment cette conception fondamentalement incarnée de la cognition, permet de faire émerger de la signification, de donner du sens (positif ou négatif) à certains éléments de notre environnement.

Tout cela, parce que tout organisme vivant est un petit îlot d’ordre dans un océan de désordre, autrement dit qu’il déroge localement au deuxième principe de la thermodynamique, celui de l’entropie croissante dans l’univers. Cette tendance au désordre, à la désorganisation, chaque organisme vivant y résiste en recherchant les substances qu’il est capable de métaboliser pour renouveler ses constituants (qui se dégradent constamment en vertu de ce second principe) et en fuyant les dangers qui menacent de porter atteinte de façon directe à l’ensemble de sa structure.

Des comportements d’approche des ressources ou d’évitement de la douleur émergent ainsi grâce à la boucle sensori-motrice des systèmes nerveux des animaux. Une boucle de plus en plus modulée, dans les systèmes nerveux complexes comme le nôtre, par une multitude « d’interneurones », des neurones ni sensoriels ni moteurs que l’on retrouve dans nos vastes cortex associatifs. Ceux-là même qui pourront s’activer en « offline » pour nous permettre des simulations abstraites de toutes sortes (par opposition au « online », c’est-à-dire l’action effective en temps réel sur le monde).

J’ébauche ici à peine le parcours que j’aimerais vous proposer dans cette première séance, bien loin, donc, des approches fonctionnalistes plus ou moins désincarnées que l’on retrouve encore trop souvent dans la majorité des manuels scolaires. Et pour vous montrer que cette thèse de la continuité entre la vie et la cognition (ou le « mind », en anglais), est plus que jamais d’actualité dans les grands débats contemporains en sciences cognitives, cet article, paru vendredi dernier et intitulé : « Where There is Life There is Mind: In Support of a Strong Life-Mind Continuity Thesis”.

Cette façon très large de considérer la cognition humaine comme faisant partie d’un continuum datant des origines de la vie est d’autant plus stimulante qu’on commence à montrer, comme dans cet article, qu’elle est compatible avec des principes physiques encore plus larges de minimisation de l’énergie libre (en gros, cette bonne vieille entropie qu’on essaie de repousser…), et donc de relier ni plus ni moins notre pensée au reste de l’univers…

C’est là où je voudrais en arriver avec vous mercredi prochain à 19h, après peut-être une couple des délicieuses bières du bar la Station Ho.st où se déroulera ce cours de l’UPop Montréal…  😉

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